I – L’aboutissement d’un intérêt durable
À l’automne 1982, pendant le Congrès International d’Astronautique qui se déroulait à Paris, trois leaders de la communauté spatiale japonaise, le Dr. Ryojiro Akiba, le Professeur Hiroki Matsuo, et le Dr. Koryo Miura, se sont retrouvés près du siège de l’ESA avec les dirigeants de l’U3P de l’époque au restaurant parisien « La Flambée ». Au cours de cette rencontre marquante, l’équipe japonaise a annoncé son engagement et sa participation pour une course Terre-Lune de voiles solaires.
Cette volonté japonaise de travailler au développement des voiliers solaires s’est quelques années plus tard retrouvée gravée dans la fresque artistique qui décore l’entrée du centre de recherche de l’ISAS à Sagamihara, où figure en bonne place un panneau de voile solaire en train de se déployer à partir du pliage imaginé par le Dr. Miura.
Au début des années 90, l’équipe de l’ISAS a participé à la tentative de lancement d’un composite comprenant un voilier solaire européen, un voilier américain, et un voilier japonais en vue de la course Terre-Lune dont le règlement venait d’être entériné par la Fédération Internationale d’Astronautique avec un départ à l’intérieur d’une sphère de 50 000 km de rayon et une arrivée définie par la prise d’une image du centre de la face cachée de la Lune. Cette aventure technologique et sportive qui devait marquer le 500ème anniversaire du voyage de Christophe Colomb a été avortée quand les conditions politiques et économiques se sont dégradées en raison de la première Guerre du Golfe.
Les études japonaises se sont poursuivies et, après la consolidation du secteur spatial japonais au sein de la JAXA au milieu de cette première décennie du 21ème siècle, des essais de déploiement ont été effectués le 9 août 2004 à partir d’une fusée-sonde S-310 lancée depuis le centre spatial d’Uchinoura. Les voiles avaient une épaisseur de 7,5 micromètres, et les tests se sont déroulés avec succès respectivement à 122 km et 169 km d’altitude.
Le 20 mai 2010, le lancement de la première voile solaire opérationnelle de l’histoire de l’astronautique a été effectué par un lanceur H-IIA en même temps que l’injection de la sonde Akatsuki (Planet-C) en direction de la planète Vénus.
II – Une mission interplanétaire probatoire
La mission est partie pour une durée prévue de 6 mois, avec deux objectifs principaux :
•valider le système de déploiement de la voile solaire et la capacité à capter l’énergie solaire grâce aux cellules minces installées sur la voile
•démontrer la capacité du satellite à se déplacer et à effectuer une navigation en utilisant la pression photonique, en estimant le module et la direction du vecteur d’accélération photonique.
La phase de déploiement s’est correctement déroulée entre le 26 mai et le 10 juin 2010
Le 16 juin 2010, la caméra DCAM2 s’est séparée du corps du voilier pour en prendre des images dans sa totalité.
Le 16 juillet 2010, IKAROS a commencé à évoluer grâce à la pression photonique.
III – Ikaros : Caractéristiques techniques
IKAROS est une voile de forme carrée de 14,1 mètres de côté (20 mètres de diagonale) fabriquée en polyimide de 7,5 micromètres d’épaisseur. Des cellules solaires minces couvrent 10 % de sa superficie. Des portions de la voile sont couvertes de cristaux liquides pour générer une poussée variable.
Au centre de la voile se trouve une capsule d’un mètre de diamètre qui contient tous les autres composants du satellite, notamment l’électronique de commande et des petits moteurs pour le contrôle d’orientation. Le voilier IKAROS pèse au total 315 kg dont 15 kg pour la voile proprement dite.
La voile d’IKAROS est, pour le lancement, enroulée autour de la partie centrale du satellite, Une fois en orbite, le satellite est mis en rotation par ses moteurs (36 tours par minute), ce qui entraîne dans un premier temps le déploiement de masses situées aux coins de la voile.
Puis dans un deuxième temps, la voile, encore partiellement pliée, se déroule pour former une étoile à quatre branches. Ensuite, la voile est complètement libérée et se déploie pour prendre sa forme carrée définitive.
Lorsque le déploiement est achevé, la vitesse de rotation est réduite par les moteurs d’orientation pour permettre les manœuvres.
Pour orienter la voile, huit parties de celle-ci situées près de chaque angle sont couvertes de cristaux liquides qui offrent une réflexion diffuse ou une réflexion spéculaire selon le courant électrique. En électrifiant différemment deux bandes situées de part et d’autre du centre de masse du satellite, il se crée ainsi un couple de forces qui permet de faire pivoter la voile.
IV – Perspectives futures
La JAXA étudie le lancement à la fin de la décennie 2010 d’une sonde spatiale hybride d’environ 50 mètres de diamètre équipée d’une voile solaire et de propulseurs électriques pour l’exploration de Jupiter et des astéroïdes troyens.
Voir aussi : retranscription de la conférence U3P-Ikaros 2011.